Rien de plus banal et passe-partout que ce nom-là : Paul Martin. C’est un peu comme Jean Dupont ou Pierre Bernard : des états civils que l’on ne retient pas tant ils sont monnaie courante. Si Paul Martin ne brille pas par l’originalité de son identité, il se distingue par l’éclat de son palmarès sportif et de sa réflexion sur le sport, voire sur la vie dans sa globalité. Suisse, né en 1901 et mort en 1987, il a participé à la bagatelle de cinq Jeux Olympiques entre 1920 et 1936 et a décroché la médaille d’argent aux JO de Paris en 1924 sur 800 m. Voilà qui ne nous rajeunit pas, me direz-vous, et vous auriez bien raison !

Au-delà de la carrière sportive de cet homme par ailleurs éminent chirurgien, je souhaite surtout pointer la pertinence de la réflexion de ce champion qui n’a eu de cesse de promouvoir la course à pied, les valeurs de l’olympisme, les vertus du sport en général et même une certaine philosophie de vie. Dans Le sport et l’homme, Paul Martin évoque notamment la compétition et les motivations qui animent l’athlète. Souvent confrontée à l’incompréhension des personnes peu sportives ou totalement rebutées par la compétition, j’ai trouvé dans ces lignes des formules particulièrement intéressantes et une analyse pertinente de la pratique sportive. Il y a même des phrases entières qui mériteraient d’être apprises par cœur… non ?  😉   Je vous laisse méditer ces deux extraits.

« L’athlète n’évite pas la difficulté, il la recherche pour la vaincre ; il ne craint pas la fatigue, mais il s’entraîne à en triompher. Il ne se laisse pas dominer par la crainte, mais cherche la confiance en soi. Le but de la compétition (par laquelle l’athlète s’oppose à des énergies autres que la sienne) n’a pas pour objet de développer chez le sportif l’esprit d’inimitié ou la haine de l’adversaire. Le sportif considère l’opposition, qui est l’essence même de la compétition, comme une occasion de donner son maximum, de découvrir et d’utiliser toutes les ressources qu’il a en lui et que, peut-être, il ignorait. L’adversaire n’est pas l’ennemi qu’il faut abattre, mais le jalon qu’il faut dépasser ; le but de ce dépassement n’est pas de faire de son adversaire son propre piédestal, mais d’exprimer dans une forme personnelle toute la perfection dont le sportif est capable, perfection qui sera une sorte de plénitude et de joie et un exemple pour les autres. »

« On ne peut qu’admirer le calme parfait des grands champions qui s’apprêtent à affronter les épreuves décisives. (…) Le champion a la confiance absolue d’atteindre un but précis : le dépassement de soi-même ; il sait qu’il va fournir la preuve de ce qu’il y a de meilleur en lui. Peut-être triomphera-t-il des autres compétiteurs ; quoi qu’il en soit, il aura triomphé de lui-même. Les athlètes pénétrés de cet esprit ne peuvent que goûter la joie de la lutte car, vainqueurs ou vaincus, ils savent qu’ils n’ont aucun reproche à se faire. Ils peuvent donc, sans hargne, tendre la main à l’adversaire, se plaire à reconnaître son mérite et le mesurer à sa juste valeur. »

Douglas Lowe, vainqueur, félicité par Paul Martin à l'arrivée du 800 m aux JO de Paris en 1924. (© IOC Olympic Museum Switzerland)
Douglas Lowe, vainqueur, félicité par Paul Martin à l’arrivée du 800 m aux JO de Paris en 1924. On remarquera l’équipement, notamment les chaussures qui, aujourd’hui, paraissent tout simplement hallucinantes… (© IOC Olympic Museum Switzerland)
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