L’heure de l’ultime course de la saison a sonné. Dernier dossard, dernier départ, dernier effort, dernière ligne d’arrivée. Un footing de récupération le lendemain, puis un échange avec mon entraîneur.

– Nous allons couper l’entraînement pendant trois à quatre semaines.

– Trois semaines ??? Je peux faire d’autres activités quand même ?  (Vous noterez que je suis non seulement effarée, mais aussi que j’ai d’office réduit la période à trois semaines… Moi, addict ? Pas du tout !)

– Oui, tu peux marcher, rouler, nager… mais tu ne cours pas ! 

– Bon…

Me voilà donc privée de ma drogue quotidienne pendant 21 jours. Je sens que cette phase d’abstinence sera difficile…

Pourtant je suis consciente de l’importance de cette coupure annuelle. Grâce à elle, ce n’est pas uniquement le corps qui va se régénérer, c’est aussi le mental. Pendant de très longs mois, l’entraînement intensif et les compétitions ont mis à mal les articulations, muscles et tendons. L’organisme tout entier a puisé dans ses réserves pour encaisser les efforts répétés et repousser toujours plus loin ses limites. Le mental a lui aussi été mis à rude épreuve. Il faut donc savoir être raisonnable et donner le temps à toutes les composantes de la performance (physiologiques, physiques et psychologiques) de se reconstituer. Peut-être faut-il aussi laisser le temps à l’organisme d’assimiler tout ce qu’on lui a appris pendant la saison. C’est un peu comme si l’athlète était un champ fertile, exploité à plein rendement pendant une certaine période. A un moment donné, il faut nécessairement le laisser en jachère pour lui permettre de se régénérer. Sinon il finit par s’épuiser !

Malgré la certitude du bien-fondé de ce repos annuel, je nourris néanmoins une crainte commune à tous les coureurs assidus : et si cette période de relâche était synonyme de régression ? Et si tous les efforts et progrès de la saison écoulée étaient anéantis en trois petites semaines de repos ? Il faut cependant éloigner ces angoisses car la coupure annuelle a d’indéniables vertus. Après une période sans running (qui ne signifie pas sans activité physique… ouf !), on remet les pieds dans les baskets avec une envie décuplée, une énergie intacte et un organisme prêt à affronter de nouveau des séances éprouvantes. Bref, il faut s’arrêter pour mieux courir.

Il n’empêche que je me sens quand même un peu orpheline depuis quelques jours… Involontairement, mes yeux fixent l’horloge à l’heure habituelle de l’entraînement. Et je lutte contre l’envie quasi-irrésistible d’aller trotter sur un chemin. Serait-ce là le signe d’une indéniable dépendance ? Peut-être… à moins que ce ne soit simplement le symptôme d’une vraie passion.

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