Allez, soyez honnête ! Avouez que vous avez, vous aussi, ressenti des courbatures terribles après une belle séance ou une compétition. Ah, on ne fait pas le fier quand on a du mal à descendre les escaliers, n’est-ce pas ? Si les courbatures concernent fréquemment les débutants, elles touchent aussi les coureurs aguerris. Explications.
« Tiens, j’ignorais que j’avais un muscle, là… et là aussi, d’ailleurs ! » Le coureur courbaturé découvre son corps. En grimaçant. Le moindre geste de la vie quotidienne devient une torture. Très banales, les courbatures – appelées par les scientifiques DOMS ou delayed onset muscle soreness (douleurs musculaires décalées) – correspondent à l’apparition d’une douleur, d’une sensibilité et/ou d’une raideur au niveau des muscles sollicités lors d’un effort inhabituel ou intense. Elles se distinguent des blessures qui apparaissent pendant l’exercice physique car elles se font ressentir 6 à 48 heures après l’effort et peuvent durer jusqu’à une semaine.
Les courbatures, késako ?
Soumises à des tensions inhabituelles, certaines fibres musculaires (les moins résistantes et souvent les plus vieilles) subissent des microlésions responsables d’une inflammation au sein de la cellule musculaire. Le corps étant une machine particulièrement bien organisée, d’autres cellules sont alors appelées à l’aide au niveau des zones lésées afin de libérer des molécules responsables de la douleur. Leur mission est aussi simple que salvatrice : réparer les muscles et les renforcer, histoire de mieux encaisser l’effort la fois suivante. De plus, au cours de l’effort physique, des déchets métaboliques s’accumulent dans les muscles. Ces déchets, non éliminés, seraient eux aussi responsables des douleurs éprouvées après l’exercice. En tout cas, les recherches scientifiques ont prouvé sans équivoque que les courbatures ne sont pas provoquées par l’acide lactique puisque celui-ci est éliminé en une vingtaine de minutes après l’activité.
Bref, pour résumer, les courbatures proviennent d’une sollicitation inhabituelle des muscles, quantitativement (volume) ou qualitativement (gestuelle). Tout nouveau geste est potentiellement synonyme de DOMS : le débutant a mal aux jambes après son premier footing, tout comme le coureur aguerri qui, ayant introduit des exercices de préparation physique (PPG) comme les sauts de grenouille ou les fentes sautées, risque fort de découvrir des muscles qu’il ne pensait pas posséder ! Ce qui est rassurant dans le processus physiologique des courbatures, c’est que l’organisme est doté d’une étonnante capacité d’adaptation : le deuxième footing et la deuxième séance de PPG seront probablement bien moins douloureux.
Éviter les courbatures
Personne n’apprécie de marcher en crapaud le lundi matin en allant au bureau ou de grimacer en montant dans le bus. Mais comment échapper à cette plaie que tout coureur subit un jour ou l’autre ? Malheureusement, il n’y a pas de remède miracle, si ce n’est s’entraîner le plus régulièrement possible. Plus l’organisme a l’habitude de réaliser un effort physique donné, moins il est sujet à l’inflammation découlant des microlésions musculaires. La progressivité constitue elle aussi un paramètre crucial pour éviter les courbatures. Un débutant n’a pas intérêt à commencer par un footing d’une heure et un néo-trailer ne gagnera que de belles douleurs aux quadriceps s’il fait sa première sortie avec un fort dénivelé négatif. Quant au runner confirmé mais peu habitué à la PPG, il n’aura pas franchement intérêt à enchaîner cinq séries de sauts de grenouille… à moins qu’il ait envie de se souvenir de sa séance pendant une semaine ! Néanmoins, à bien y réfléchir, une question sous-tend la première : faut-il réellement chercher à éviter les courbatures ? En effet, si celles-ci permettent de renforcer le muscle en le rendant plus apte à encaisser l’effort suivant, alors ne faut-il pas justement provoquer volontairement des courbatures – dans la mesure du raisonnable, évidemment – afin de rendre les muscles plus résistants ?
Éliminer les courbatures
Quoiqu’il en soit, les courbatures n’ont rien d’agréable et peuvent parfois empêcher d’enchaîner une autre séance ou une autre compétition. Pas idéal lorsqu’on s’efforce d’être régulier ! Pour limiter l’intensité et la durée des DOMS, on a quasiment tout entendu : des étirements à la cryothérapie, des massages aux bains d’eau chaude, chacun y va de son petit conseil. Mais quelles sont les solutions réellement efficaces ?
- Les courbatures n’étant pas provoquées par une contracture ou par le redouté et redoutable acide lactique, les étirements se révèlent inutiles. On peut les pratiquer s’ils apportent un certain bien-être, mais ils ne favorisent pas l’élimination des douleurs.
- D’après certaines études, les massages auraient un effet bénéfique car ils activeraient des gènes permettant de réduire les mécanismes inflammatoires et ils favoriseraient la production de mitochondries au sein des cellules, ce qui améliorerait la cicatrisation des microlésions musculaires. Il reste cependant encore à définir la durée du massage, sa nature (superficiel ou profond) et le moment optimal auquel il doit être pratiqué après l’effort. En revanche, on a une certitude : le bien-être et la détente liés aux massages jouent un rôle non négligeable, notamment sur le plan psychologique.
- Très en vogue, la cryothérapie a des vertus vasoconstrictrices (réduction du calibre des vaisseaux sanguins) et antidouleur. Les conclusions des études sont cependant contradictoires selon le type de méthode utilisée (durée d’immersion, température, délai après l’effort…). Il semblerait a priori que l’alternance entre immersion froide et chaude soit l’option la plus efficace car elle provoque une succession de vasoconstrictions et vasodilatations bénéfiques pour le muscle.
- Le fameux footing de décrassage, qui correspond à une récupération active, a la cote dans les milieux sportifs, qu’il soit réalisé immédiatement après l’effort ou le lendemain. Il s’oppose à la récupération dite passive qui consiste… à ne rien faire du tout ! Là encore, plusieurs études ont montré l’inutilité de ce fameux décrassage, voire son effet délétère sur la performance au-delà des trois jours suivant l’effort. Par ailleurs, les courbatures perturbent la gestuelle à cause de la douleur et nuisent à la perception du schéma corporel ; s’entraîner en souffrant de DOMS accroîtrait ainsi le risque de blessure, les articulations étant moins bien tenues par les muscles et la proprioception étant amoindrie. Il semblerait donc plus adapté de respecter une courte phase d’inactivité. Les courbatures atteignant généralement leur paroxysme 48 heures après la séance qui les a provoquées, la bonne option est de rester deux jours au repos complet avant d’effectuer de nouveau des séances sportives, de préférence sans impact (natation, vélo…). La reprise d’une activité physique non intense et sans choc permet, d’une part, de drainer les toxines musculaires et, d’autre part, de secréter des endorphines aux vertus antalgiques.
- S’il est une option à oublier et bannir absolument, c’est bien celle de la trousse à pharmacie ! Contrairement à une idée très répandue, les antalgiques et les anti-inflammatoires n’ont aucun effet sur les courbatures, si ce n’est un effet placebo. Ils nuisent même à la réparation des microlésions ! Vu que les courbatures ont un sacré avantage – elles renforcent les muscles – mieux vaut éviter d’avaler un comprimé qui, en plus de ne pas soulager, annule l’intérêt de l’effort laborieusement fourni.
- Enfin, une hydratation conséquente et une alimentation riche en protéines favorisent la reconstruction musculaire et contribuent à une meilleure récupération.
En tout cas, une chose est sûre : les courbatures, ce n’est pas comme la confiture. Plus on en a, moins on les étale, sans doute parce qu’il subsiste un petit fond de honte : si on a mal partout le lendemain d’un entraînement, c’est parce qu’on n’est pas encore habitué à fournir ce genre d’effort. Pourtant, au lieu de les considérer seulement comme un signe de faiblesse, les courbatures mériteraient d’être estimées à leur juste valeur : si les muscles se souviennent de ce qu’on a fait la veille ou l’avant-veille, c’est qu’on a bien travaillé… et qu’on sera plus fort demain !
Évolution des courbatures depuis l’effort initial (jour 0) jusqu’à leur disparition
Un p’tit coup à boire ?
En phase de récupération, l’organisme a besoin de reconstituer son stock de sels minéraux perdus pendant l’effort. Les bicarbonates et le gaz carbonique contribuent particulièrement à la récupération. Privilégiez donc des eaux minérales tels que Saint Yorre, Badoit et Vichy. Vous avez également intérêt à veiller à un apport simultané d’acides aminés, de vitamines du groupe B et de glucose qui accompagnent la régénération musculaire – à condition toutefois d’être ingérées rapidement après l’arrêt de l’activité (dans les deux heures maximum). Toutefois il est inutile de vous surchargez en glucides après l’effort : plusieurs études préconisent l’apport de seulement 1,5 g de sucre (à index glycémique élevé) par kg de poids corporel dans les deux heures qui suivent l’entraînement ou la compétition. Si de nombreuses marques de nutrition sportive proposent des boissons de récupération, décryptez les étiquettes car les compositions sont souvent loin d’être saines. La simplicité et les recettes maison font très bien l’affaire. Fouillez sur le web, vous trouverez des recettes faciles et savoureuses !
Votre commentaire