Fin août. L’été meurt lentement… tout comme les ultratrailers engagés sur des défis complètement fous mourront à petit feu dans quelques jours ! Ultra Tour des 4 Massifs, Echappée Belle, UTMB, Grand Raid des Pyrénées, Tor des Géants… Dans le sillage de leur aîné, l’UTMB, les ultratrails fleurissent en cette fin d’été. Leurs points communs ? Tous font le plein de participants et tous affichent des distances et dénivelées positives hallucinantes. Pourquoi l’ultra est-il si florissant ?
L’offre est pléthorique pour une raison toute simple : parce que la demande est très forte ! La moindre épreuve, aussi locale soit-elle, réunit plusieurs centaines de coureurs, ce qui témoigne de l’appétit insatiable des pratiquants, certains n’hésitant pas à épingler le dossard d’un ultra au moins une fois par mois. Quant à l’apparition de compétitions longues distances à la fin du mois d’août, elle n’est sans doute pas étrangère à l’UTMB dont les règles du jeu (points qualificatifs, tirage au sort…) écartent de nombreux concurrents de la ligne de départ. Il faut donc bien proposer des courses alternatives aux recalés du Mont Blanc et à ceux qui, pour des raisons diverses et variées, ne souhaitent pas prendre part à la grosse machine chamoniarde.
Toujours plus long, toujours plus dur : telle pourrait être la devise des trailers. Mais que cherchent ces fondeurs avides de kilomètres ? Le trail reste intimement lié à une aspiration : pratiquer la course à pied en pleine nature dans une ambiance conviviale et sans subir la pression du chronomètre, contrairement aux épreuves sur route. Mais pourquoi une telle tendance à la surenchère en termes de distance et de dénivellation ? D’une part, les exploits de certains champions ont totalement démystifié les longues distances. D’autre part, dans nos sociétés où la performance est reine dans tous les domaines (vie privée et professionnelle), le trail est une manière supplémentaire de prouver sa capacité à réaliser une performance, celle-ci étant d’autant plus valorisante qu’elle paraît insurmontable. L’ultratrailer se sent l’étoffe d’un héros : repousser toujours plus loin ses limites physiques et mentales, acquérir une reconnaissance au sein de son cercle familial et amical par le simple fait de participer à un ultra et encore plus en le terminant, appartenir à la communauté des ultratrailers sont autant de moyens de se construire une image positive. Et probablement aussi de se prouver quelque chose à soi-même. Aller au bout d’un ultra, c’est pouvoir se dire avec fierté : « Je l’ai fait. J’ai surmonté les difficultés, j’ai réussi à dépasser mes limites. » Quoi de plus grisant que le sentiment d’être allé aux confins de ses possibilités psychologiques et physiques ? Quoi de plus jouissif que de franchir cette limite invisible dont beaucoup de coureurs parlent avec une sorte d’émerveillement, ce moment où le cerveau lâche prise, où le corps se met en pilotage automatique et où l’esprit se détache de tout pour accéder à une espèce d’état second ?…
Les taux d’abandon sont souvent très élevés sur les ultras sans que cela n’affaiblisse cependant l’engouement pour ces épreuves. Pourquoi ? Parce que préparer un ultra, c’est déjà appartenir au cercle des forçats de la montagne. On ne s’aligne pas au départ d’une épreuve de 100 km sans entraînement, à moins d’être légèrement inconscient… ou particulièrement doué ! Pendant les longs mois de préparation, le coureur bénéficie déjà de la reconnaissance de son entourage et des autres trailers. Se soumettre à la discipline de l’entraînement (les interminables sorties en montagne, les levers à 5h du matin le dimanche pour partir courir, les séances de nuit pour s’habituer à trotter à la lueur d’une frontale…) permet d’ores et déjà de se sentir un peu « surhomme », un peu exceptionnel. Même s’il abandonne ou ne passe pas les barrières horaires, l’ultratrailer acquiert une certaine considération et il se sent l’âme d’un aventurier pendant quelques kilomètres. Et puis l’ambiance est si particulière sur ces épreuves extrêmes : les premières foulées avant le lever du jour, la colonne de loupiotes dans la nuit, le bruit exacerbé des pas sur les sentiers alors que la nature est encore endormie… Le simple fait de prendre le départ donne envie de recommencer même lorsqu’on ne franchit pas la ligne d’arrivée. Mais seuls ceux qui vivent ces instants peuvent expliquer ce qui les incitent à se lancer ces défis hallucinants. Et ils seront des milliers au cours des prochaines semaines à parcourir inlassablement les chemins…
20/08/2014 at 15:57
Bien ton analyse Marie
26/08/2014 at 07:44
C’est tout à fait ça. Sans parler du fait de briser notre routine, qui est là encore un sacré moteur.