Un gymnase qui ne paie pas de mine, quelques tables jetées ça et là en guise de guichet d’inscription et de retrait des dossards, une équipe de bénévoles visiblement survoltés (et fatigués) et des coureurs aux looks bigarrés, du trailer chevronné équipé de pied en cap en Salomon dernier cri au coureur sans chichi arborant un vieux short en coton et un tee-shirt éculé… Oh oui, les « courses saucissons » ont un charme inimitable ! Elles fleurent bon le running dans toute sa simplicité et son esprit originel. On y retrouve une ambiance bon enfant et décomplexée. On savoure la dimension artisanale de l’organisation, bien éloignée des grosses machines certes parfaitement huilées mais souvent impersonnelles et ouvertement lucratives.

Ce matin, j’avais envie de renouer avec ces atmosphères villageoises et ces lignes de départ où l’on ne croise pas de cadors nationaux mais seulement des coureurs « normaux », de ceux qui chaussent leurs baskets deux ou trois fois par semaine pour la seule passion de courir. J’ai donc enfilé ma tenue de traileuse et j’ai rejoint Noyarey, petite bourgade située au pied du massif du Vercors, à quelques encablures de Grenoble. J’ai trouvé là-bas tous les ingrédients d’une savoureuse « course saucisson » : le vieux gymnase, les tables alignées devant l’entrée, les bénévoles d’une gentillesse extrême, le pot de confiture bio en guise de cadeau participant et la foule hétéroclite de coureurs. J’y ai également déniché des visages connus : quelques champions locaux et, surtout, quelques amis. Loin du stress qui entoure toujours une course de renom, je me suis élancée pour 20 km et 1400 m de dénivelée positive dans une totale décontraction et avec un objectif très simple : me faire plaisir ! D’accord, je dois avouer qu’accessoirement il était aussi question de réaliser une sortie longue dynamique.

Bon, il n’aurait pas fallu faire une séance en côte vendredi, ni 50 km de vélo de route hier soir… 😉  Les jambes ont piqué dans les montées raides tracées « dré dans l’pentu » par des organisateurs apparemment joueurs. Les cuisses ont fumé dans les descentes jouissives mais cassantes. La brise a caressé mes joues dans les (rares) portions de relance où je grappillais des places. Aux intersections, aux ravitaillements et sur le bord des chemins, les bénévoles arboraient tous un sourire réconfortant et ne ménageaient pas leurs encouragements. Après 2h27 d’effort, je franchissais la ligne d’arrivée en deuxième position féminine.

Et je retrouvais là encore tout ce qui fait de ces courses de village des instants franchement sympathiques : les concurrents qui se parlent même s’ils ne se connaissent pas, les copains qui se félicitent mutuellement, les couples qui se racontent leur périple (Monsieur sur le parcours long, Madame sur la « petite » course), le chronométreur un peu débordé, les bénévoles qui piquent les dossards sur une tige métallique à l’arrivée et l’incontournable buffet campagnard.

Comme si les organisateurs avaient deviné mon désir de vivre une authentique « course saucisson », la remise des prix fut un grand moment. Visiblement, je n’avais pas été comptabilisée dans les arrivées (ou alors dans la catégorie masculine ?) et ne fus pas appelée sur le podium. Qualifiée de « contestataire » parce que je signalais l’erreur, j’intégrais le podium avec le sourire et recevais une récompense digne de ce nom : du fromage et une bouteille de vin. Et si vous leviez votre verre avec moi en l’honneur de ces délicieuses « courses saucissons » ?